Homelie de l'archevêque de Bamako lors de la messe chrismale 2013

Prêtres, ministres témoins de la foi et de la charité à la suite de Jésus-Christ

Salutations

Bénissons le Seigneur. Il nous donne l’occasion de célébrer  la Messe chrismale par anticipation en ce jeudi 21.3.13.

Les 21 et 22 mars nous rappelle le coup d’Etat survenu il y a un an. Nous pensons à tout ce qui s’est passé dans notre pays de janvier 2012 à ce jour : les morts, les refugiés, les exactions de soutes sortes, viol, amputations, humiliations de toutes sortes, avec la volonté, la détermination d’imposer à toutes et tous la sharia.

Tout cela va contribuer au réveil des frustrations et des oppositions des rivalités internes dont le pays souffre encore aujourd’hui. Un aujourd’hui marqué par l’engagement de la communauté internationale  et régionale auprès des maliens pour neutraliser les envahisseurs.

Nous célébrons cette messe chrismale dans un pays en guerre. Comment vivre notre ministère sacerdotal dans un pays en guerre, à la reconquête de son unité, de la paix depuis un an ?

Oui comment nous comporter aujourd’hui en vrais disciples, apôtres, amis, frères et témoins de Jésus aujourd’hui au Mali. Comment aider nos communautés à vivre comme tels.

Vous savez mes biens chers frères et sœurs, le cœur de l’homme est plein de mystère. Il y est capable de tout. Il finit par s’habituer à tout. A force de voir des images, d’entendre des nouvelles sur ce qui se passe au Nord, nous pouvons finir par nous familiariser avec le mal, nous pouvons le banaliser et y être indifférents. Cela peut nous révolter, à réveiller en nous les démons de la haine, de la violence, de la vengeance, de l’exclusion.

Devant l’ampleur du mal, nous pouvons  nous reconnaitre impuissant et vivre dans la passiveté. Ni l’indifférence, ni la passiveté, ni la violence, la haine et la vengeance ne sont des remèdes appropriés et salutaires. 

Disciples, apôtres, amis, frères et témoins de Jésus, nous devons nous laisser comme lui animer par l’Esprit de Dieu ! C’est ce que nous venons de chanter : l’Esprit de Dieu repose sur moi,

l’Esprit de Dieu m’a consacré,

l’Esprit de Dieu m’a envoyé proclamer ni la haine, ni la vengeance, ni l’indifférence, ni la passiveté, mais la paix, la joie, la vie, l’amour. C’est ce que la Parole de Dieu proclamée par le prophète Isaïe et réalisée pleinement par Jésus nous révèle aujourd’hui. C’est la réponse de Dieu à notre interrogation :

Comment vivre notre sacerdoce dans le Mali d’aujourd’hui. Le Mali qui a célébré Noël et qui va célébrer la Pâques dans la guerre ?

Comment nous comporter comme des personnes envoyées pour apporter la bonne nouvelle aux pauvres ? Guérir ceux qui ont le cœur brisé, annoncer aux prisonniers la délivrance, aux captifs la liberté ? Consoler tous ceux qui pleurent, redonner la joie à ceux qui sont en deuil ? Donner des habits de fête à ceux qui sont dans le désespoir, Faire recouvrir la vue , la lumière aux aveugles, participer à la transformation des cœurs de pierre endurcis, en cœur de chair fraternels ?

Transfuser dans les cœurs, en réponse à la haine l’amour

En réponse à l’offense  le pardon

En réponse à la discorde ; l’union

En réponse à l’erreur, la vérité

A la place du doute, la foi

A la place du désespoir l’Espérance

A la place des ténèbres, la lumière

A la place de la tristesse, la joie

A la place des ténèbres, la lumière.

L’accomplissement d’un tel ministère passe par notre attachement au Christ prêtre.

Ce que Jésus proclame aujourd’hui, c’est tout son programme de vie. Programme de vie dont la réalisation lui permet de rassurer les disciples de Jean Baptiste sur son identité.

En effet, étonné, dépassé par ce fait que son message sur la conduite du Messie, ne correspond pas à la vie et au ministère de Jésus. Il envoie ses disciples lui demander. Es-tu qui doit venir ou bien devons-nous en attendre un autre ? La réponse de Jésus est claire.

Allez dire à Jean Baptiste ce que vous voyez :

  • Les aveugles voient
  • Les sourds entendent
  • Les muets parlent
  • Les boiteux marchent
  • La Bonne Nouvelle est annoncée.

Bien chers frères et sœurs, replongeons –nous dans les  Evangiles. Nous découvrirons par nous même  la vérité de ce témoignage. Jésus guérit, Jésus  nous éduque par ses paroles et son exemple. Son action touche la personne humaine dans sa totalité. Le physique le psychique  le moral, le spirituel. Son action vise à étancher notre soif de perfection. Notre aspiration à devenir ce que nous sommes. Enfants de Dieu, Saints comme notre Père céleste est saint. Il faut pour cela que notre vie est notre ministère  soient échos fidèles, image de son appel à la perfection. Comme le Père céleste qui fait lever son soleil sur les justes et les injustes, qui fait pleuvoir sur les bons et les méchant.

Entendre ce message aujourd’hui, l’aujourd’hui du Mali en guerre. C’est nous sentir appelés à entrer  dans l’essentiel de la Mission de Jésus, de la vie et de la mission de Jésus. Nous réconcilier avec le Père, nous reconnaître  entre nous. Rétablir la paix avec Dieu et entre nous. C’est de cela dont nous avons besoin dans nos équipes sacerdotales dans nos secteurs et nos paroisses, dans notre Diocèse, dans nos campagnes et villes, dans le Mali tout entier.

Pour y arriver il faut accepter de nous laisser guider comme Jésus par l’Esprit. C’est  lui qui rendra fécond notre vie et notre ministère de prêtre. C’est lui qui fera le don des prêtres à la manière de Jésus Christ  au service d’un Mali en guerre pour recouvrir sa dignité.

Ce Christ dont l’Eglise va nous faire revivre  la dernière semaine de sa mission terrestre, semaine de sa passion, de sa mort. Pour nous les hommes et pour notre salut, et de sa glorieuse. Semaine qui va nous introduire  dans le temps pascal, marqué par la détermination  de Jésus ressuscité  à rassembler ses disciples, ses amis, ses frères, et témoins autour d’un double message , la Paix soit avec vous- Allez , je vous envoie soyez mes témoins.

Sa Parole est ses sacrements sont les trésors qu’il nous confie pour devenir ce qu’Il attend de nous et aider les autres à le devenir. Chaque jour, nous faisons l’expérience, de notre faiblesse, de notre incapacité, de notre indignité, Il le sait plus que nous. Et pourtant, Il nous rassemble aujourd’hui  pour nous redire comme à Pierre, m’aimes-tu ? Paie mes brebis !

Ma grâce te suffit.

Aussi j’accueille les cinq oui que chacun va prononcer aujourd’hui  et s’engager à nous aider à exercer les ministères de la Parole, des sacrements  pour la  sanctification du Peuple de Dieu  et pour votre salut !

En réponse à cet engagement du Christ, redisons avec joie et humilité : l’Esprit de Dieu repose sur moi, l’Esprit de Dieu m’a consacré, l’Esprit de Dieu m’a envoyé proclamer la paix, la joie !

                                                       

                                                                  + Monseigneur Jean ZERBO

                                                                  Archevêque de Bamako